Une émission proposée et présentée par Pascale Fourier sur ALIGRE FM 93.1 en région parisienne

 

EMISSION DU 18 AVRIL 2006

Il y a des solutions pragmatiques... Il suffit de s'asseoir autour d'une table....". Faut voir....

Avec Gérard Mauger, Sociologue, directeur de recherche au CNRS, directeur adjoint du Centre de Sociologie Européenne, membre d'Attac, et du collectif Raison d'agir.

 

Pascale Fourier : Et notre invité aujourd'hui ...

Gérard Mauger : Gérard Mauger. Je suis sociologue, directeur de recherche au CNRS. Je suis aussi directeur adjoint du Centre de Sociologie Européenne, le centre de recherches de Pierre Bourdieu. Je suis également membre d'Attac, et du collectif Raison d'agir qui était un groupe de réflexion politique fondé par Pierre Bourdieu en 1995.

Pascale Fourier : Ahlala... et moi, c'est pour une question toute bête que j'ai fait déplacer un monsieur comme vous.... C'est que, l'autre jour, avec les techniciens et des animateurs, on était en train de parler du CPE. Et l'un d'entre eux me dit: «  Je ne comprends pas... Pourquoi on ne sait pas en France se mettre autour d'une table et discuter sereinement pour essayer de résoudre les problèmes !  » . Moi bêtement, je n'ai pas su lui répondre.... alors je compte sur vous...


Gérard Mauger
 : Je veux bien essayer... C''est une préoccupation très ancienne, dans l'Histoire, de chercher comment faire pour créer un consensus. Les philosophes français, et pas seulement français, se sont préoccupés de cela. Je pense à Rousseau par exemple, et à son contrat social; c'est un exemple archétypal des tentatives de trouver un accord où, de l'intérêt particulier de chacun, naîtrait une volonté générale telle que le respect de cette volonté générale permettrait à chacun de respecter ses intérêts particuliers. Je schématise, mais grosso modo c'est ça. C'est important, parce que je pense que ça a donné lieu à de multiples variantes. Dans l'ordre économique, je pense à Adam Smith, qui développe la pensée libérale qui court encore les rues aujourd'hui. Schématiquement l'idée est la suivante : l'intérêt général naît de la poursuite par chacun de ses intérêts particuliers sur un marché libre et non faussé.

Ce thème de la recherche d'un consensus qui ferait qu' il n'y aurait plus de conflits, que tout le monde arriverait à s'accorder est donc un thème très très ancien. Il amusait beaucoup Marx. Dans « L'idéologie allemande », un texte qui est toujours merveilleusement d'actualité et souvent extraordinairement drôle, Marx se moquait de ce type de tentatives. Saint Sancho, disait-il, invitait les hommes à renoncer à l'idée de conflits: tout irait mieux si les hommes renonçaient à l'idée de conflits. Marx développe. Si on peut souhaiter, dans un monde rêvé, dans la tête des philosophes, qu'il n'y ait pas de conflits, qu'il n'y ait pas d'intérêts divergents, que les hommes soient pacifiques et bons et s’entendent tous très bien, force est de constater que ce n'est pas comme ça que ça se passe, que le conflit est omniprésent, que le conflit est de tous les temps et se déroule au fil du temps sur de multiples scènes. Sur la scène politique, ou dans le champ des luttes de classes. Je vais faire un peu d'Histoire élémentaire, pour rappeler ce que tout le monde connaît. 1789, il s'est passé quelque chose en France, qui avait à voir de toute évidence et malgré toutes les controverses qu'on voudra avec des luttes qui opposaient des classes opposées. 1848, ça recommence. 1871, la Commune: rebelote. 1936, le Front populaire. 1968, bien qu'aujourd'hui on voudrait que ça ait été un monôme étudiant... Mai 1968 est quand même un moment très fort, qu'on peut appeler un moment de lutte de classes. Marx dans le Manifeste, dit que l’Histoire de toute société jusqu'à nos jours, c'est l'histoire des luttes de classes. Une thèse forte, comme ça, on peut la contester, mais enfin, pas complètement. Dire que le cours de l'Histoire n'a rien à voir avec ce que Marx appelait la lutte des classes, je crois que c'est faire fort. Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce qu' effectivement, l'Histoire est faite d'affrontements d'intérêts antagonistes.

I y a ces luttes-là, mais pas seulement... On pourrait aussi en ajouter bien d'autres. Je ne dis pas que l'Histoire est faite simplement de l'histoire des luttes de classes. Il y a aussi des luttes sur d'autres terrains, des luttes religieuses, des conflits de générations qui peuvent être plus ou moins violents, mais parfois qui peuvent atteindre une intensité particulière. Les luttes de domination, entre hommes et femmes: c'est aussi un conflit récurrent, qui a fait que les hommes ont pu maintenir pendant longtemps leur domination, jusqu'à maintenant; ça s'atténue, mais c'est aussi au prix de luttes spécifiques. Ce type de conflit, hommes/femmes, oppose des groupes différents, des groupes transversaux par rapport aux classes sociales. D'autres conflits existent aussi dans d'autres champs. Il y a aussi des conflits symboliques: on pourrait parler des conflits littéraires entre les Anciens et les Modernes ou des conflits dans les sciences sociales.... Voilà de très multiples conflits, sans parler des guerres entre Etats. Les conflits, il y en a partout. C'est un fait. On peut le déplorer, on peut trouver que c'est très triste que ce soit comme ça. Mais il y a des conflits constamment, et s'il y en a, c'est parce que il y a des conflits d'intérêts.


Pascale Fourier : Oui, mais on a l'impression que depuis une trentaine d'années il n'y a plus vraiment de conflit parce qu'on est tous dans la même une barque et qu'on doit tous lutter pour assurer la compétitivité de la France, notre place dans l'organisation économique internationale par exemple....

Gérard Mauger : Un mot encore sur ce que je venais de dire. Je disais que le conflit est partout – et certains s'étonnent apparemment d'une France qui serait particulièrement frondeuse, querelleuse... En même temps, on ne peut s'étonner tout aussi bien de ce que l'ordre social règne la plupart du temps... De façon générale, il ne se passe rien ou pas grand-chose, des luttes mais de faible intensité, des luttes symbolique sans doute, mais des affrontements durs, prolongés etc., c'est quand même relativement rare dans l'Histoire.

C’est, je pense, pour des sociologues une question tout à fait importante justement que de comprendre comment, en dépit de l'objectivité de conflits d'intérêts qui opposent les dominants aux dominés - pour faire simple - l'ordre règne, de façon générale. C'était une question centrale pour Pierre Bourdieu qui a construit une théorie explicative très forte autour du concept de « violence symbolique » qui permet de comprendre pourquoi de façon générale l'ordre règne. Je crois grosso modo que la violence symbolique, ça peut se décliner de deux façons. C’est d'une part tout ce qui est fait, tout ce qui est déployé comme efforts pour convaincre les dominés que l'ordre social tel qu'il est est un ordre social légitime, c'est-à-dire très souvent un ordre social naturel, fondé en droit, en mérite.... « C'est la volonté de Dieu ».... Les justifications ont varié au cours des temps, mais enfin c'est un ordre universel légitime. Il faut donc convaincre les dominés de la légitimité de l'ordre... et, d'autre part, il faut leur accorder des compensations. On concède donc aussi des compensations aux dominés, de temps en temps quand ils s'énervent un peu trop. Je schématise un peu cruellement, mais d'une certaine façon, on pourrait dire que dans les années d'après-guerre, en France, l'Etat Social comme on dit aujourd'hui a été une espèce de compromis qui s'est établi justement entre des forces antagonistes; c'est un compromis conflictuel, mais qui a permis que s'établisse une espèce de consensus autour d'un ordre qui était celui des Trente Glorieuses et de l'État Providence, ou de l'État social, comme on voudra.


Alors, j'en viens plus directement à la question que vous me posiez, celle de l'ordre social néolibéral qui s'est imposé petit à petit, dans les faits et dans les esprits, au prix de ce qu'on pourrait appeler, et de ce que Bourdieu, je le cite encore pardonnez-moi, appelait « une révolution conservatrice » qui se met en place à partir de la deuxième moitié des années 70 en France grosso modo. Pour comprendre cette espèce de retournement par rapport aux Trente Glorieuses dont je parlais tout à l'heure, et cette espèce de compromis qui s'était établi, il faut voir qu'il y a eu un déséquilibre de ce compromis, un basculement en quelque sorte de l'ordre social qui s'était établi, du consensus sur un certain ordre qui était lié à l'état d'un rapport de force. On va voir évoluer le rapport de force entre les classes au sein des différents champs, politique, scientifique, idéologique... On voit cet ordre basculer.

Par rapport à ce basculement, il y a deux choses qui me semblent importantes. Il y a d'une part la disqualification des classes populaires, pour faire vite. Cette disqualification des classes populaires, je crois qu'elle est d'abord économique : c'est la disparition de pans entiers des grands bastions ouvriers, des grandes industries, les mines, la sidérurgie, etc., autant de défaites qui signent la démobilisation politique des bastions du monde ouvrier, des valeurs aussi de virilité attachées à ce monde, qui ont contribué je crois très fortement à la déstructuration des classes populaires.
D’autre part, c'est aussi la disqualification politique. C’est le déclin du PC, le déclin de la CGT, l'effondrement du mur de Berlin, du socialisme réel et donc du paradis rêvé, etc. Tout cela s'effondre.
C'est aussi la disqualification symbolique. C'est le déclin du marxisme. C'est la perte des mots de la « tribu » . Ce serait très intéressant de voir comment les médias, et les savants aussi, ont contribué à défaire les mots de la « tribu », fait disparaître un certain vocabulaire. Les usines sont devenues des entreprises, les patrons sont devenus des entrepreneurs, les grèves des mouvements sociaux... une espèce d'invention d'un nouveau lexique qui implique la perte des repères. On pourrait continuer comme cela, mais je pense qu'on voit la ligne générale.


On assure la défaite du camp opposé, et par ailleurs on passe à l'offensive... Ce triomphe, cette hégémonie néolibérale qui est en train de se mettre en place est aussi le résultat d'un travail politique et symbolique de conquête, qui s'est mis en place de façon stratégique, organisée, de façon assez consciente. Keith Dixon raconte dans un livre qui s'appelle Les évangélistes du marché, comment, depuis la Société du Mont Pèlerin, ces gens, ces pèlerins en l'occurrence du néolibéralisme, ont essaimé à travers le monde et à travers les classes dominantes. En France par exemple il faudrait montrer comment le néolibéralisme est devenu la pensée officielle des écoles du pouvoir, à commencer par Sciences-Po et l'ENA; comment c'est devenu la pensée officielle des écoles de commerce, HEC, l'ESSEC, mais aussi de toute cette flopée de petites écoles qui distillent la pensée néolibérale sous forme de l'idéologie managériale qui me semble être ce qu'on appelle la pensée unique. Tout cela peut peut se décrire et s'objectiver. Voyez aussi les rapports universitaires entre l'économie et la gestion: l'économie petit à petit cède le pas à la gestion; cette espèce de discipline inventée, cette discipline roturière, plébéienne est en train de devenir la discipline dominante et même de dominer l'économie au sein de l'université. Tous ces renversements sont autant d'indications de ce triomphe de la pensée libérale.

Dans le champ politique, la droite et la gauche « de gouvernement » comme on dit, celle des professionnels de la politique ont été petit à petit dominées par cette pensée néolibérale, droite et gauche confondues - et pour cause, ce sont tous des énarques, qui viennent tous du même endroit, qui ont été formés à la même école... Ils croient, je pense, réellement à cette pensée devenue d'autant plus crédible qu’elle est unique; puisque tout le monde pense pareil, c'est vrai: ça devient une espèce de pensée universelle... Pour les élites médiatiques, formées aux mêmes écoles, c'est pareil. Et dans l'univers scientifique où je suis, malheureusement ça gagne du terrain et nous, nous en perdons constamment.

En clair, je pense que le résultat, c'est le triomphe, l'hégémonie de la pensée néolibérale dans le champ politique, dans le champ intellectuel, dans le champ médiatique. Cette hégémonie, la façon peut-être de la formuler au plus vite, c'est le titre de Fukuyama, « la fin de l'Histoire » : c'est terminé.... ; on est enfin arrivé à un stade où l'ordre règne, l'ordre naturel règne, ordre naturel donc universel, donc aussi éternel, donc aussi intangible parce que cet ordre néolibéral se présente comme un ordre fatal contre lequel on ne peut rien, parce qu'il est dans l'ordre des choses.


Pascale Fourier : Des Sous et Des Hommes donc en compagnie de Gérard Mauger, qui est directeur de recherche au CNRS et sociologue. Tout à l'heure vous avez utilisé le mot néolibéralisme. Vous essayez à nouveau de placer les choses sur un plan idéologique ! Peut-être qu'il faut savoir aussi en sortir car on est confronté à de graves difficultés, notamment au chômage, non ? !

Gérard Mauger : On ne peut pas nier que ceux qui subissent le chômage, ceux qui sont chômeurs ou précarisés ne soient pas en difficulté majeure, confrontés à l'impossibilité de toute espèce de projet d'avenir. Il faudrait entreprendre de lutter pour résorber le chômage et la précarité... D'ailleurs à entendre ce qui se dit, on pourrait croire que le fameux consensus dont vous parliez tout à l'heure est réalisé: tout le monde est contre le chômage ! A les entendre tout le monde est absolument contre le chômage ! Vous allez dire que j'ai mauvais esprit– peut-être -, mais moi j'ai des doutes.... Je suis pas très sûr que tous soient vraiment de fervents combattants contre le chômage, ne serait-ce que parce que l'existence d'un chômage de masse est une arme de lutte formidable des classes dominantes contre les classes dominées. Grâce à la pression qu'il s'exerce sur tous ceux qui sont au travail pour les faire se tenir tranquilles.... «  Si tu n’es pas content, dégage, il y en a cinquante qui attendent... » . Le raisonnement est simple mais formidablement efficace. C'est la même chose je crois avec tous ces contrats précaires où on dit aux intérimaires ou aux gars en CDD: « Si tu es sage, peut-être auras-tu un jour un CDI ». Ils n'en ont jamais bien sûr: il faut voir ce que montrent les enquêtes de Beaud et Pialoux sur Peugeot... C’est très instructif, on comprend comment ça marche... Ce n'est pas une thèse abstraite. Reprendre actuellement ce que disait Marx sur « l'armée industrielle de réserve » que constitue le chômage, ce n'est pas chercher à emmerder le monde: c'est simplement s'interroger sur son caractère opératoire...

L'existence-même d'un fort volant de chômage, « l'armée industrielle de réserve », la précarisation du travail à travers le développement des contrats intérimaires, des CDD, du temps partiel , c‘est une arme pour rendre les travailleurs dociles, pour éviter les luttes. C'est extraordinairement pratique, il faut bien le dire ! Ajoutons la sous-traitance qui atomise les collectifs de travail. Le raffinement des techniques de lutte de classe des classes dominantes, à travers les « stratégies néomanageriales », a ses faiblesses, ses fragilités, mais elles sont aussi formidablement efficaces.


Pascale Fourier : On pourrait vous dire que les dominants profitent d'une situation, mais qu'ils ne l'ont pas forcément voulu...

Gérard Mauger : Oui, effectivement, on peut aussi dire ça. Je ne suis pas sûr que ce soit absurde d'ailleurs. Je pense que ce n'est pas la peine non plus de les faire plus machiavéliques ou plus tous puissants qu'ils ne sont. À vrai dire, dans le monde social, ceux qui prétendent gouverner sont bien arrogants: ils gouvernent ce qu'ils peuvent et ne peuvent pas toujours grand chose en fait. Je pense que l'idée de la toute-puissance des politiques est une idée magique un peu fausse, héritée d'un passé monarchique, de droit divin.

Mais pour ce qui est du chômage, en tout cas, on peut dire que c'est providentiel. Ca aide bien... Ca a ses inconvénients parce que ça engendre, chacun sait ça, des troubles, la montée de la délinquance, la montée de l'insécurité, les émeutes dans les banlieues. Mais je pense que, pour certains, ça n'a pas que des inconvénients....

On peut analyser en fait tous les dispositifs de lutte contre le chômage qu'ils n'ont pas arrêté de nous pondre depuis trente ans comme des tentatives de déstabilisation du Code du travail, de façon récurrente, intensive, au nom du social: c’est une espèce de paradoxe. Par exemple, pour mieux insérer les « jeunes en difficulté », comme on dit, depuis trente ans on a inventé des dispositifs qui, de bonne ou de mauvaise foi, ont eu pour effet de contribuer à la déstabilisation du marché du travail et à sa précarisation accrue. C'est par là que sont entrés l'intérim, les CDD, les emplois protégés, les contrats spéciaux etc. On voit bien la suite du film: on y est, là... On y était il n'y a pas longtemps avec Balladur. Balladur fait quoi avec son CIP ? Il étend les dispositifs pour les jeunes en difficulté jusqu'à bac+2. Ca ne passe pas, parce que pour le coup, les jeunes se disent : « J'ai fait bac+2, ça ne sert à rien, on va pouvoir me payer 80 % du SMIC » . C'est l'émeute, dans les IUT, les STS, etc., dans des endroits qui n'étaient pas habituellement, dans le monde étudiant, particulièrement révoltés. Là pour le coup, c'est explosif ! Et Balladur, prudent, fait marche arrière. De Villepin fait aujourd'hui, avec le CPE, la même ânerie. Stratégiquement, c'était fondé: étendre la précarisation du marché du travail à tout le marché du travail jusqu'à 26 ans, tout niveau de diplôme confondu. Là aussi, il déclenche un véritable tollé de tous ceux qui se sentent concernés et qui le sont, de fait, par une précarisation généralisée du marché du travail. L'objectif, je crois, est tout à fait clair : précarisation. Pour quoi faire ? Eh bien simplement pour rendre cette main-d’œuvre docile. Si vous êtes en CPE, vous pouvez être viré pour rien... «  Sans motif », ça veut dire que vous avez intérêt à vous tenir à carreau, à être sage, poli, docile, et un fervent jeune salarié... « Merci patron, merci patron, je veux travailler encore plus tous les jours ». C’est ce que l'on attend. C'est ça, l'objectif. Je pense qu'il illustre bien la permanence de cette espèce de violence douce - ce n'est pas la violence brutale, c’est la violence symbolique - dont parlait Bourdieu. C’est une violence douce qui s'exerce en particulier sur le marché du travail.

Ce qui est amusant, c'est de voir qu'en général ça passe, ...et puis parfois ça casse. C'est l'espèce de miracle de la vie sociale. Et le défi pour les sociologues, c'est de comprendre pourquoi de temps en temps justement ça casse, pourquoi l'ordre se lézarde, pourquoi il y a une faille qui se crée et que ça résiste. Là pour le coup, pour transformer le marché du travail, ça va être dur: ils vont avoir du mal, je pense, pour un bon bout de temps. Pourquoi ? A cause d'une faute symbolique majeure. Le CPE en était une. Je pense qu'afficher comme cela l'arbitraire, un droit institutionnalisé à l'arbitraire, la précarité institutionnalisée, pour tout le monde, ça ne pouvait pas passer. Pour tout le monde en plus ! Ils auraient fait ça pour Moustafa en banlieue, à bac -5, bon, passe, mais là maintenant même ca, ça neva plus passer . Ils vont essayer de rattraper l'affaire en disant: « Non non non, ce n'est pas pour vous, les étudiants à bac + 5 ! Vous n'êtes pas concernés C'est juste pour Moustafa ! « . Je pense que là, ils ont fait effectivement une faute politique majeure.

C'est une faute symbolique parce que justement elle est telle qu' elle rend visible finalement des desseins qui sont d'habitude cachés. Ils vendent la mèche eux-mêmes, montrent les mécanismes de domination. Ils les rendent visibles sans l'avoir voulu... C'est un lapsus, un lapsus politique qui rend visible les intentions, ces dogmes néolibéraux dont je parlais tout à l'heure.


 

Rappel : Vous pouvez imprimer ce texte. Quel que soit l'usage que vous en ferez, il vous est demandé de citer votre source : Emission Des Sous...et des Hommes du 18 Avril 2006 sur AligreFM. Merci d'avance.