Pascale
Fourier : Alors comme d'habitude, je lis les journaux,
et ces derniers temps j'ai lu des choses qui concernaient EDF. J'avais
appris que lors du sommet européen à Barcelone à
la mi-mars, finalement les 14 pays de l'union européenne pressaient
le gouvernement français d'ouvrir le marché à la
concurrence à 100% y compris pour les particuliers, mais ouf
! , c'est du moins ce que j'ai compris, le service public d'EDF était
sauvé grâce à l'action conjointe de Chirac et Jospin.
C'est ça ?
Henri Guaino :
Ce n'est pas tout à fait ça, même si le sommet de
Barcelone marque une inflexion dans le processus de libéralisation
du marché de l'électricité en Europe. En fait,
il faut faire un petit peu d'histoire pour comprendre où nous
en sommes, et comprendre ce qui vient de se passer. L'histoire commence
en 1996 quand les pays européens ont accepté de signer
une directive sur l'électricité qui prévoit la
libéralisation d'une partie du marché dit des professionnels,
c'est à dire du marché des entreprises. A partir de cette
date, les clients d'EDF d'une certaine taille ont le droit de s'adresser
à d'autres fournisseurs d'électricité qu'EDF. Une
instance a été créée pour veiller à
la régularité de la concurrence, qui s'appelle la commission
de régulation de l'électricité. L'ouverture a commencé
en 1996, et il est clair que, dès lors que le marché était
partiellement ouvert, un jour ou l'autre il allait devoir s'ouvrir en
totalité. Pour une raison très simple, c'est qu'en ne
l'ouvrant qu'à une partie des acteurs, on crée une distorsion
de la concurrence qui est insupportable pour ceux qui ne sont pas soumis
à la libéralisation. Dans le système actuel, un
gros client d'EDF peut bénéficier de tarif plus avantageux
qu'un petit client professionnel d'EDF, ce qui met l'entreprise petite
ou moyenne dans une situation de désavantage relatif par rapport
à des concurrents plus importants. Donc il était inévitable
qu'un jour ou l'autre le marché des professionnels s'ouvre à
100%. A Barcelone il a été décidé que cette
ouverture serait achevée en 2004. On avait prévu auparavant
je crois, de faire ça en 2003, donc on a reculé d'un an
le calendrier. On a ensuite regardé la question du marché
des particuliers. Pour l'instant à Barcelone, on a décidé
de ne pas donner de date sur l'ouverture du marché des particuliers.
Ce qui ne veut pas dire que le marché ne s'ouvrira pas. En réalité
le marché s'ouvrira fatalement un jour ou l'autre dès
lors que le marché des professionnels est ouvert.
Pascale Fourier
: Oui?? Pourquoi ?
Henri Guaino :
Tout simplement, on ne peut pas maintenir séparés très
longtemps les 2 marchés à l'intérieur de la même
entreprise. Si on voulait le faire, il faudrait d'abord s'entendre sur
une définition claire des professionnels et des particuliers,
pour tracer une frontière juridique qui soit nette et incontestable.
Deuxièmement, il faudrait sans doute séparer l'entreprise
d'électricité en un compartiment destiné aux particuliers,
un compartiment destiné aux professionnels, l'un vivant les règles
de la concurrence, l'autre vivant sous l'empire du service public, et
puis mettre probablement à part la production qui fournit les
2 marchés. Il faudrait accepter de couper en 3 l'entreprise Electricité
de France, sachant que celle ci est soumise à une autre coupure
déjà envisagée par les textes européens
qui est la coupure entre les infrastructures de transport de l'électricité
d'une part, et puis la distribution de l'autre. Tout ça pour
permettre aux concurrents de faire transiter leur électricité
sur les infrastructures de transport électrique. Donc on aura
en réalité une entreprise qui serait coupée en
4 morceaux indépendants ce qui serait évidemment extrêmement
dommageable pour l'outil industriel. Donc il est clair qu'à terme,
de toute manière, le marché des particuliers sera lui
aussi un jour ou l'autre ouvert. La précaution qui a été
prise à Barcelone et qui est d'une certaine manière un
peu nouvelle, c'est qu'on dit qu'on attendra, pour ouvrir le marché
des particuliers, de s'être mis d'accord sur la directive européenne
des services publics. C'est à dire la directive qui va fixer
les règles que les Etats peuvent mettre en œuvre pour préserver
les missions de service public et qu'ils vont donc appliquer ou qu'ils
seront autorisés à appliquer demain à toutes les
entreprises fournissant de l'électricité, du chemin de
fer, de la poste, de la santé, etc.…Donc c'est sans doute
là que se situe l'infléchissement majeur, c'est que, pour
une fois, on conditionne la libéralisation d'un secteur de l'économie
ou d'une partie de ce secteur, à la mise au point de cette directive
sur les services publics qui n'allait pas de soit encore il y a quelque
temps parce que la notion de service public est une notion, au fond,
on s'en rend compte aujourd'hui, très française.
Pascale Fourier
: J'aurais voulu savoir pourquoi le ou les gouvernements ont finalement
signé les directives de 1996. Ca me semble assez obscur...
Henri Guaino :
Oui, ça semble obscur à beaucoup de gens, notamment à
tous les défenseurs du service public. Ca me paraît à
moi-même assez obscur, dans la mesure où non seulement
rien ne nous y forçait, mais en plus il se trouve que le secteur
de l'électricité est celui dans lequel il est le plus
difficile techniquement et économiquement d'appliquer les règles
de la concurrence, pour des raisons qu'on comprend aisément dès
qu'on se penche sur le sujet, à savoir que l'électricité
est un bien qui n'est pas stockable, on ne peut pas la conserver, un
kilowattheure ne peut pas être distingué d'un autre kilowattheure,
et en plus, on la transporte très mal. Donc il est très
difficile dans ces conditions techniques d'introduire de la concurrence.
Et d'ailleurs, dans le passé, même dans les phases extrêmement
libérales, la concurrence n'existait pas vraiment en matière
d'électricité puisque à l'époque où
c'était un secteur privé, on accordait des concessions,
des sortes de concession de service public en fait, mais on ne séparait
jamais, par exemple, les infrastructures et l'exploitation, et on ne
mettait pas en concurrence auprès des consommateurs sur une zone
géographique donnée, les différents fournisseurs
d'électricité, parce que c'est extrêmement difficile.
Et enfin, c'est un secteur qui est soumis à ce que les économistes
appellent une sorte de loi des rendements croissants, c'est à
dire qu'il y a beaucoup d'investissement à faire pour pouvoir
produire de l'électricité, qui mettent très longtemps
à fournir un rendement financier et, d'autre part, qui créent
des sortes d'indivisibilité qui font que plus on est une grande
entreprise plus on fait d'économie d'échelle et plus on
arrive à produire de l'électricité à moindre
coût. Ce qui fait qu'il y a toujours eu dans ce secteur, depuis
que ça existe, une tendance à la concentration plutôt
qu'une tendance à la division en entreprises de plus en plus
petites. Donc des entreprises de plus en plus grandes qui, progressivement
s'acheminent vers des situations de monopole pour des raisons non pas
idéologiques mais de calcul économique rationnels, ce
qui a conduit d'ailleurs beaucoup d'Etats occidentaux, notamment après
la guerre, à constituer des grandes entreprises de service public
avec des monopoles publics plutôt que des monopoles privés.
Ce n'était pas un choix tant idéologique d'ailleurs, qu'un
choix de rationalité économique. Ce qui est frappant dans
cette affaire c'est qu'au nom de l'économisme ambiant, on est
allé contre les lois élémentaires du calcul économique,
de la rationalité économique, de l'efficacité économique.
Il est clair que les entreprises d'électricité en Europe
demain, seront moins efficaces sans doute qu'hier. En tous cas ce sera
incontestablement le cas pour EDF, qui était une incontestable
réussite sur le plan technique, économique, sur le plan
des coûts, de la continuité du service et en même
temps de l'accomplissement des missions de service public.
Pascale Fourier
: Donc quand on nous dira peut-être que c'était l'intérêt
des consommateurs de libéraliser les services de l'électricité
…
Henri Guaino :
Il est assez difficile d'accréditer cette thèse dans la
mesure ou ça ne fait pas réellement baisser les prix,
notamment les prix des consommateurs particuliers. Il y a beaucoup de
concurrence sur le marché de l'entreprise et on se rattrape souvent
sur les particuliers. Deuxièmement, ça met en péril
la continuité du service et la sécurité de l'approvisionnement,
et je ne crois pas que l'intérêt des consommateurs ait
particulièrement été soigné en Californie
par exemple. Donc, on est dans une situation où on ne voit pas
tellement les avantages évidents pour les consommateurs. Encore
une fois parce que techniquement la concurrence s'applique très
mal dans ce secteur.
Pascale Fourier
: Je ne comprends pas toujours tout moi, vous savez, en économie,
et là je ne comprends pas trop parce que justement on était
en train de dire que finalement non, ce n'est pas de l'intérêt
du consommateur d'aller dans cette direction. Alors encore une fois
pourquoi ?
Henri Guaino :
Je crois qu'il y 2 choses : il y a une idéologie dominante qui
veut que la concurrence soit la solution à tous les problèmes
et qu'elle soit toujours efficace, ce qui en l'occurrence pour l'électricité
n'est techniquement pas vrai, (laissons de côté le débat
idéologique). La deuxième remarque, c'est que cette idéologie
de la concurrence a beaucoup imprégné les institutions
européennes, la construction européenne, depuis le départ.
Il faut savoir qu'en Europe, très longtemps, le seul droit européen
était le droit de la concurrence. Nous payons aujourd'hui le
prix de tous les engagements, de tous les traités, de tous les
textes que nous avons signés, négociés, ratifiés
sur la base de ce droit de la concurrence. Donc tout ce qui nous arrive
c'est la conséquence des choix que nous avons faits au moment
du marché unique bien sûr, mais aussi au moment de Maastricht,
qui n'a pas été le moment de remise en cause qu'il aurait
pu être, et puis ensuite les directives que l'on a prises sur
la base des traités, notamment la directive de 96. Il y a une
espèce d'engrenage en Europe, d'engrenage administratif, bureaucratique,
technocratique, juridique et aussi il faut le dire politique, qui fait
qu'on ne revient presque jamais en arrière et que la responsabilité
politique ne s'exerce presque jamais à propos des textes européens.
Et une fois qu'ils sont signés, on voit là avec la directive
de 96, eh bien le reste suit logiquement. Il y a un engrenage logique.
Une fois qu'on ouvre à la concurrence, il faut aller au bout.
C'est ainsi, il faut être conséquent, et c'est je crois
le vrai problème politique actuel, il faut être conséquent
avec les décisions qu'on prend. Nous payons le prix des décisions
passées et je suis convaincu que, hélas, nous n'avons,
à ce stade, pas d'autres choix que d'assumer ces conséquences
le mieux possible pour essayer de perdre le moins possible. Sans doute
on peut déplorer, et moi je suis le premier à le déplorer,
qu'on ait trouvé une faible majorité pour ratifier le
traité de Maastricht. On aurait pu sans doute à ce moment
là, remettre en cause beaucoup de choses. On ne l'a pas fait,
c'est triste à dire, mais une majorité de français
ne s'y est, hélas, pas opposée. De même qu'aucune
majorité politique ne s'est opposée à la directive
de 96 sur l'électricité, puisque c'est d'elle dont nous
parlons, ni ce qu'on appelle la droite qui l'a signée, ni ce
qu'on appelle la gauche qui l'a ratifiée. Maintenant nous sommes
confrontés aux conséquences de ce que nous avons collectivement
décidé. Et ce que nous avons collectivement décidé
pour l'instant, c'est de construire une Europe dans laquelle la notion
de service public à la française telle que nous la connaissions
n'a pas sa place. On pourrait même dire plus brutalement que la
notion de pacte social, de contrat social telle que nous la connaissons
en France n'a pas sa place et que même le modèle républicain
que nous avons construit depuis 200 ans en France n'a pas non plus sa
place. Il faut s'y faire. C'est l'Europe que nous avons voulue. Alors
il ne faut pas dire que l'on ne peut pas infléchir les choses,
mais dans l'avenir il faut savoir que ce sera très difficile
et que beaucoup de logiques sont déjà enclenchées.
Nous ne sauverons pas la totalité de notre modèle républicain,
pour faire simple. Maintenant nous sommes confrontés à
ce véritable problème politique, moral de l'avenir de
la république en Europe telle qu'elle est. Il ne faut pas croire
que l'on va s'en sortir en faisant des chartes sociales, des chartes
des droits fondamentaux. Il va falloir s'impliquer très fortement
dans le processus de réflexion sur la constitution européenne,
sur les principes qui la fonderont, sur la part qui va rester dévolue
aux démocraties nationales. Je crois que tout ça, c'est
ce qui nous attend demain. En tout état de cause, les tenants
du modèle républicain, du pacte social, du modèle
social français ou même d'un modèle social européen
qui ne serait pas demain condamné à devenir un modèle
anglo-saxon, tous ceux qui veulent empêcher cette évolution
qui paraît aujourd'hui inéluctable, doivent regarder les
choses en face, tirer les conséquences de ce qui a été
fait, et s'engager pleinement dans la réflexion et dans le combat
sur les futures institutions européennes.
Pascale Fourier
: Mais là, il y a peut-être certaines personnes qui pourraient
vous dire que, finalement, on ne va pas vraiment vers une libéralisation
d'EDF, on va simplement peut-être vers une ouverture du capital.
En tous les cas c'est ce qu'on nous a annoncé dans les media.
Henri Guaino :
Ce qui est sûr, c'est qu'à partir du moment où on
a rompu avec le monopole, on a rompu avec le modèle ancien du
service public à la française. Avec comme conséquence
que les marchés seront libéralisés et que, deuxièmement,
la libéralisation des marchés obligeant fatalement EDF
à reculer sur le marché national pour laisser de la place
à des concurrents, elle oblige quasiment EDF à aller conquérir
des positions pour compenser ce recul, à l'extérieur du
territoire national, dans d'autres pays européens. Je dirais
que c'est presque obligatoire, dans la mesure où nous avons construit
collectivement la plus grande entreprise d'électricité
du monde et sans doute la plus performante, et si on ne veut pas perdre
cet avantage là, il va falloir compenser le recul ici par une
avancée ailleurs. Seulement pour avancer ailleurs, on l'a vu
récemment quand EDF a voulu aller en Italie, il faut, si on veut
pouvoir racheter les autres, être aussi soi-même rachetable.
Donc il faut que le capital soit ouvert. Là où il y a
une hypocrisie assez profonde à mon sens, c'est de laisser croire
qu'en ouvrant un peu le capital d'EDF, on va préserver l'essentiel
du modèle du service public à la française. Une
fois que le capital est ouvert, que ce soit un peu ou beaucoup, minoritairement
ou majoritairement, l'entreprise est forcée de se comporter selon
les règles de la concurrence et de la rentabilité financière,
et non plus selon les règles et les critères du service
public. C'est fatal. Donc on se trouve (on l'a vu avec France Télécom),
confronté à la situation suivante : si vous n'ouvrez pas
le capital vous ne pouvez pas vous étendre, si vous ouvrez un
peu le capital vous ne pouvez pas pénaliser les actionnaires
qui sont rentrés, donc vous êtes obligés de viser
la rentabilité financière, ce qu'on appelle aujourd'hui
la création de valeur pour l'actionnaire, et non plus la création
de valeur pour la collectivité. Et dès lors que vous avez
besoin de capitaux supplémentaires pour vous développer,
vous êtes obligés de faire appel au marché. Alors
l'Etat peut évidemment souscrire en théorie à des
augmentations de capital et garder sa part. Simplement si l'Etat le
fait, Bruxelles l'accusera de subventionner une entreprise concurrentielle,
et donc de créer une distorsion de la concurrence, un désavantage
pour les autres concurrents producteurs et distributeurs d'électricité.
Dans ces conditions il sera très difficile à l'état
d'injecter les moyens financiers nécessaires dans cette entreprise.
D'autant plus que l'Etat, on le sait, a de moins en moins de moyens
financiers disponibles pour ce type d'opération. Donc il sera
obligé de perdre petit à petit sa part de capital, jusqu'à
perdre la majorité. Simplement ça se fera dans la pire
des conditions. Moi j'appelle ça la politique du chien crevé
au fil de l'eau. C'est à dire qu'à la fin ou bien vous
gardez la majorité, mais vous vous sur-endettez comme France
Telecom et vous arrivez au bord de la faillite ou bien vous perdez progressivement
la majorité, simplement vous la perdez sans avoir fixé
avant les règles qui vont régir les rapports entre l'Etat
et cette entreprise pour laquelle la collectivité a consenti
beaucoup d'efforts, et qui est un outil industriel formidable.
Pascale Fourier
: Est-ce qu'on peut quand même sauver un petit quelque chose de
cette entreprise qui finalement je pense satisfaisait quand même
assez les français ?
Henri Guaino :
Oui, qui avait des résultats tout à fait étonnants
du point de vue technique comme du point de vue économique. Tout
le monde était servi en courant et avec un prix de revient du
courant qui est relativement faible par rapport à tous les autres
pays développés et une sécurité d'approvisionnement
très grande. Evidemment il faut essayer de sauver l'essentiel,
ce qui veut dire, comme je le rappelais tout à l'heure, qu'il
faut être conséquent. Je ne sais pas si la libéralisation
continuera indéfiniment, mais il se peut que des accidents dans
l'avenir remettent en cause tout ce processus. On n'est à l'abri
de rien. Mais en attendant, les choses qu'on voit bien sont enclenchées
dans cette direction et vont continuer. Quelles que soient les majorités
au pouvoir, on ira vers la libéralisation. Alors comment sauver
l'essentiel ? D'abord en évitant le démantèlement
de l'entreprise. Ca me paraît quelque chose de tout à fait
essentiel. On voit aujourd'hui fleurir des plans de réorganisation
(je pense à EDF en particulier, ce qui avait motivé l'article
que vous citiez tout à l'heure), qui prévoient quasiment
le démantèlement de l'entreprise, en créant à
l'intérieur des centres de profit autonomes qui, demain, seront
transformés éventuellement en filiales indépendantes,
de sorte que l'entreprise éclaterait. A ce moment là,
si l'entreprise éclate, il est clair qu'on ne pourra pas faire
remplir des missions de service public, même prévues par
la loi, à une entreprise qui serait partie en petits morceaux
et qui pourraient être vendus, rachetés sur le marché.
Il faut donc préserver l'intégrité de l'entreprise,
à l'exception du réseau de transport qui est déjà
sorti par les textes. Il faut préserver une entreprise intégrée.
J'irai même plus loin. Je crois qu'il faut s'interroger sur l'opportunité
qu'il y aurait, avant d 'ouvrir éventuellement le capital de
cette entreprise, à réaliser la fusion entre EDF et GDF,
de façon à constituer un grand pôle d'énergie
développant une offre combinée gaz électricité,
et auquel seraient dévolues par la loi des missions de service
public, même si le capital n'appartient plus, en tout ou partie,
à l'Etat. Mais il me paraît nécessaire aujourd'hui,
de mettre au point, très vite, une stratégie industrielle
à propos de ce pôle d'énergie si on veut demain
pouvoir préserver son intégrité et pouvoir lui
faire remplir des missions de service public.
Pascale Fourier
: L'Etat reste quand même garant d'un certain nombre d'éléments
?
Henri Guaino :
Moi je crois qu'il le faut absolument. On pourra peut être prendre
appui sur la directive des services public européens, mais je
pense que d'ores et déjà on pourrait très bien,
indépendamment de la libéralisation et de la privatisation,
prévoir des règles qui s'appliqueraient en particulier
à EDF et à GDF, lui assignant des missions de service
public compte-tenu de ce qu'ont été les investissements
publics dans ce domaine, compte tenu aussi de l'importance du nucléaire
et de l'importance stratégique de la fourniture d'électricité.
Je crois que c'est tout à fait possible à condition de
le vouloir, et de tirer tout de suite les conséquences, encore
une fois, de ce que nous avons décidé, de la voie dans
laquelle nous avons décidé de nous engager et dont je
ne vois aucune force politique décidée à nous sortir.
Avoir une vision industrielle, garder l'intégrité de l'entreprise,
éviter qu'elle soit démantelée, probablement réfléchir
à la fusion EDF/GDF et enfin faire une loi fixant les relations
entre l'Etat et ce pôle d'énergie et les missions qui lui
sont confiées.
Pascale Fourier
: Et oui c'était bien Des Sous et des Hommes. Nous étions
en compagnie d'Henri Guaino que je remercie vraiment d'être venu.
Il vient de sortir un livre, imaginez-vous, qui s'appelle La sottise
des modernes et qui est publié chez Plon. Je vous en conseille
la lecture.
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