Une émission proposée et présentée par Pascale Fourier sur ALIGRE FM 93.1 en région parisienne

 

EMISSION DIFFUSEE le 2 NOVEMBRE 2005

(ENREGISTREE LE 5 OCTOBRE 2005)

EDF: l'ouverture du capital...une nécessité??

Avec François Soult, Haut-fonctionnaire, auteur de "EDF, chronique d'un désastre inéluctable" chez Calmann-Lévy.

 

Pascale Fourier :Des Sous... et des Hommes, une émission de Pascale Fourier. Notre invité aujourd'hui :


Francois Soult: François Soult, auteur de : EDF, chronique d'un désastre inéluctable chez Calmann-Lévy.


Pascale Fourier
 : Et, haut fonctionnaire qui connaît bien le dossier si j'ai bien compris…. Ce qui m’a inquiété dans la lecture du Monde, et qui a fait que je vous ai invité donc pour la deuxième fois, puisque on s'était déjà vus il y a deux ans à peu près, c’est qu’en plein milieu du ventre du journal du 7 septembre, il était écrit : «EDF met le cap sur la privatisation »... Alors ça m'a fait un peu drôle parce que jusqu'à présent, à chaque fois qu'on disait: " On va privatiser EDF", tout le monde me répondait…. (enfin, tout le monde… les libéraux de préférence…) chacun me répondait : « Pas du tout, mais pas du tout du tout du tout, on va libéraliser le secteur de l'électricité, mais ça ne va rien changer, on ne veut pas du tout du tout privatiser EDF.... Alors qu'est-ce qui se passe ???...


Francois Soult
 : En principe, c'est la grande technique qui consiste à dire: « Bien sûr on ne privatise pas », ou « Bien sûr, on n'ouvre pas à la concurrence »... et bien sûr, on ouvre à la concurrence, et on privatise… Il y a une loi qui a été passée l'an dernier, et qui dit qu'on va « ouvrir », mais qu’on va d'abord de changer le statut de l'entreprise… Et une fois qu'on aura changé le statut, (c'est même pour ça qu'on change le statut), on va ouvrir le capital.
Donc après, c'est une question de vocabulaire, est-ce que ouvrir le capital à des actionnaires privés, c’est privatiser?... Juridiquement parlant, non… Juridiquement parlant, on privatise lorsque l'État devient minoritaire dans une entreprise, donc lorsqu'il vend plus de 50 % des actions de l'entreprise. Là, il ne s'agit pas d'une privatisation, juridiquement parlant; il s'agit néanmoins d'une privatisation en langage courant, puisqu' on va vendre une partie du capital à des actionnaires privés.

Pascale Fourier : On "vend une partie du capital", c'est-à-dire on leur vend des actions qui existent déjà ? Ça marche comment cette histoire-là ?

Francois Soult : Alors un petit peu d'histoire... EDF, c'est une entreprise nationalisée depuis 1945/1946. A l’époque, il y avait beaucoup d'entreprises privées qui intervenaient dans le domaine de l'électricité. Ca marchait tellement bien qu' au lendemain de la guerre, on a décidé de nationaliser tout ça pour faire un vrai outil industriel au service de la population et de l'intérêt général! Et cet outil industriel, juridiquement parlant, c’était un établissement public. Un établissement public, c’est créé par la loi, ou par décret, peu importe, une entité qui appartient à 100 % à l'État, et qui n’a pas d'actions. Il y a pas d'actionnaires. C'est un statut qui est prévu, donc, par des textes de nature législative ou réglementaire. Et pour ouvrir le capital d'une entreprise, encore faut-il qu'il y ait un capital, encore faut-il aussi que cette entreprise soit une société. C’est ainsi que la loi qui est récemment intervenue a transformé le statut de l'entreprise d’établissement public, (sans actionnaires, avec un propriétaire, qui était l'État, propriétaire à 100 % par définition), en une société et en actions, (donc il y a donc des parts), et une partie de ces parts vont être vendues, (en tout cas, c'est le plan qu’a le gouvernement).Le Monde annonçait début septembre que c'était imminent, et les Echos, avant-hier, annonçaient, que c'était moins imminent que ça…. Le 2 octobre, Les Echos, en page deux, de façon un peu subreptice, ont écrit : « Finalement, tout cela est très compliqué, et peut-être que ça ne va pas intervenir tout de suite. » Donc, à suivre...

Pascale Fourier : Mais est-ce que ça veut dire, que finalement, on vend les bijoux de famille de l'État ? Parce que, au total, à l'époque, toutes les petites sociétés qui, avant, produisaient de l'électricité, ont été achetées avec les sous de l'État français….

Francois Soult :Oui, si on remonte aux années 40, c'est vrai, mais il ne faut sans doute pas remonter aussi loin… Ce qui est certain, c'est que cette entreprise, elle a fonctionné en étant rémunérée par l'argent que les consommateurs d'électricité, les usagers du service public de l’électricité, payaient, comme vous et moi, en payant leurs factures d'électricité. Et cette entreprise s'est capitalisée comme ça, c'est-à-dire qu’elle a eu de plus en plus d'argent, ce qui lui a permis de faire des investissements…. Alors des investissements parfois discutables… quand on voit le nombre de tranches nucléaires d'EDF, on se demande parfois si cet argent a été parfaitement bien utilisé, ou si un mix énergétique différent, c'est-à-dire une répartition différente, plus équilibrée entre les différentes sources de production, aurait pu être fait mieux faite. Maist effectivement, tout cet argent, qui appartient à la collectivité nationale, puisque c'est la propriété de l'État, va être vendu. Alors on peut dire que les citoyens que nous sommes, qui sommes indirectement actionnaires d'EDF par le fait que l'État qui nous représente est le propriétaire à 100 % de cet établissement public, vont être indemnisés par la récupération de l'argent que va réunir la mise sur le marché des actions d'EDF. On va avoir moins de titres EDF en poche, et plus de cash en poche.

Toute la question, c'est quelle est la valeur de cette entreprise sur le marché ? C'est-à-dire à combien est valorisé EDF, et est-ce que l'on va recevoir l'argent que l'on devrait recevoir ? C'est le premier temps du raisonnement. Je note que les évaluations d'entreprise sont d'une fiabilité et d'une finesse extrême puisque c'est, selon les experts, entre 50 milliards et 100 milliards d'euros -donc, une évaluation du simple au double... on voit bien, la part d'aléas.

Et puis, le second point, c’est privatiser, ouvrir le capital, pour quoi faire ? Ce que j'ai essayé de démontrer, dans mon livre, c'est que c'est fait pour augmenter les tarifs, parce que la concurrence, et un actionnaire privé, n'est pas capable pour des raisons techniques et pas idéologique, pour des raisons purement techniques, du fait que l'électricité ne se stocke pars, du fait que le marché n'est pas capable de gérer correctement le produit électrique, eh bien pour toutes ces raisons, on risque d'aboutir à des hausses de tarifs… Le fait aussi qu'un actionnaire privé va devoir obtenir des rémunérations qui soient compatibles avec le risque qu'il prend en investissant dans l’entreprise, alors que l'État, lui, ne se rémunérait pas selon une logique publique qui est aujourd'hui contestée par la Commission européenne, mais qui consiste à dire : " Tous les consommateurs d'électricité sont également des citoyens, tout le monde consomme de l'électricité, on n’a pas le choix, il y a pas de produits de substitutionà l'électricité, et donc le fait que l'État se rémunère peu en vendant de l'électricité, parce que le fait qu'EDF ne réalise pas d'énormes profits, ce n'est pas très grave, c'est une subvention du consommateur aux citoyens, (ou du citoyen au consommateurs, en l'occurrence), mais c'est la même personne, donc ce n'est pas très grave".
Demain, avec un actionnaire privé, même s'il n'est pas majoritaire, il faut changer de logique: il faut rémunérer correctement le risque que prend cet actionnaire privé. Or ce risque est majeur, donc il va falloir rémunérer beaucoup. Alors là, la subvention croisée, elle est claire, c’est entre la poche du consommateur, (qui est également un citoyen), vers la poche d'un actionnaire privé et là, ça peut soulever de difficultés...

Donc pour répondre à votre question : est-ce que ça va nous coûter de l'argent ? Oui, ça va coûter de l'argent au consommateur qui est aussi le citoyen pour alimenter un actionnaire privé dont la valeur ajoutée, (car on pourrait se dire, ça peut être bien, l'actionnaire privé et plus efficace que l'actionnaire public... c'est incontestable), sauf que, dans le domaine de l'électricité, mon analyse, c'est que ce n'est pas le cas, et l'actionnaire privé ne va rien ajouter, ne va rien apporter, mais il va falloir mieux le rémunérer que l'État. Et là, on pourrait parler de spoliation, si on voulait être polémique, en tout cas; on peut parler de manque d'efficience économique, si on veut faire dans le technocratique.

Pascale Fourier : Vous devez vraiment être un idéologue terrible, puisque vous avez dit : « Cette privatisation, du moins, cette ouverture de capital, c'est pour augmenter les tarifs!»!!

Francois Soult :Non, je me suis laissé emporter... En réalité, le constat qu'on peut faire, en dehors de tout parti-pris idéologique, (et moi, je n'ai pas de parti-pris là-dedans, je fais un constat technique), c'est que depuis qu'on a ouvert à la concurrence le marché de l'électricité, (ça date d' Août1999 et la loi de février 2000, en France… ), en France donc, on a constaté que, alors que le seul objectif de l'ouverture à la concurrence du marché, c'était de baisser les prix, (c'était le seul argument), les prix ont depuis augmenté de 45 %... pas nos factures à nous, mais les prix pour les industriels qui peuvent faire jouer la concurrence... Ça a augmenté de 45 % ! Ce qui fait que l’UNIDEN, (l'union des industriels qui consomment beaucoup d'énergie), et qui demandait l'ouverture à la concurrence pour faire baisser les prix, a publié récemment, et à plusieurs reprises dans les deux dernières années, des articles dans la presse disant:  « Il faut arrêter immédiatement l'ouverture à la concurrence, ça nous coûte beaucoup trop cher! ».


Ça, c'est le volet « ouverture à la concurrence ». Maintenant, le volet « ouverture du capital » d'EDF, qui est complémentaire, qui est distinct mais complémentaire. Alors ce n’est pas fait pour augmenter les tarifs, bien sûr, mais son effet sera indubitablement d'augmenter les tarifs, pour une raison, qui est en réalité assez simple, même si ça passe par des mécanismes financiers plus compliqués. La raison la plus simple, c'est que l'État, aujourd'hui, étant propriétaire d'EDF, a un outil industriel, (donc il a des capitaux investis)…. Le PA de bilan d'EDF, le total des capitaux investis dans EDF, en valeur comptable, c'est à peu près 100 milliards d'euros. Donc ça fait un paquet d'argent et normalement, ce paquet d'argent, si on le met dans un bizness, c'est fait pour qu'il rapporte des sous. Et un bizness qui est aussi risqué que celui de manager des centrales nucléaires, de vendre de l'électricité, c'est un métier risqué, qui doit rapporter, si on suit les règles du marché, sans doute un retour à deux chiffres, 10,12, 13,15 %, 18 %, de rentabilité. L'État, ne tirait pas cela d'EDF. L'État tirait au maximum 2 ou 3 % de rentabilité. Un actionnaire privé qui arrive là-dedans, il veut bien mettre des sous, mais il veut que ses sous lui soient remboursés...et comme c'est risqué, il faut qu'on lui fasse un retour important…. Ca, ce sont les mécanismes élémentaires de l'économie…. « Si je prends un risque, il faut me le rémunérer, parce que je risque de perdre ma chemise, et donc si ça marche, je veux gagner un beau manteau, et pas perdre ma chemise ».
Eh bien là, c'est la même chose! C'est un bizness risqué, et moi, actionnaire privé, je veux bien mettre des sous, mais à condition que ça me rapporte, et pour que ça me rapporte, il y a deux manettes à actionner :
1 : « il faut diminuer les coût »…Alors diminuer les coûts, on peut sans doute, aujourd'hui, licencier plein de gens à EDF en disant : " il y a trop de gens occupés"». Et peut-être que, en toute honnêteté, il y a des marges de manoeuvre de productivité, comme on dit, là aussi, en langage technocratique….. Peut-être, peut-être... Encore que, ça se discute, parce que derrière, il y a la qualité du service, il y a la sécurité industrielle, il y a des tas d'arguments qui peuvent militer pour que, justement, on ne touche pas trop à la variable « personnel ».
2 : Et puis la seconde manette, c'est le chiffre d'affaires. C'est combien on gagne d'argent? Combien est-ce que EDF rapporte? Quel est le chiffre d'affaires d'EDF ?… Le chiffre d'affaires d'EDF, c'est le tarif, c'est le prix facturé aux clients. En 2007, tous les clients, y compris vous et moi, clients domestiques, seront libres de faire jouer la concurrence. Donc on devra se fournir sur un marché, et à un prix de marché. Mais le prix de marché, en électricité, il est manipulé par les producteurs, parce que l'électricité ne se stocke pas, et que c'est un bien difficilement substituable… pour toutes les raisons que je développe dans mon bouquin. Le prix de marché va s'envoler d'autant plus que l'actionnaire privé va vouloir se rémunérer sur le risque. Donc, après ces raisonnements assez simples qui ne sont contestés par personne…. c'est-à-dire que personne n'a contesté ce que j'écrivais dans le bouquin, même les professeurs à l'université, (et il y en a quelques-uns qui sont spécialisés dans l’électricité)… n'ont jamais dit le contraire. Eh bien on va constater que comme pour les consommateurs industriels, qui ont vu leurs prix augmenter de 45 %, les consommateurs individuels vont voir leurs prix augmenter par la double raison de l'ouverture au marché, et de l'ouverture du capital… L’actionnaire privé sera moins généreux que l'État, forcément, parce que, avec l'État, c'était une vraie politique industrielle, qui consistait à avoir des tarifs d'électricité faibles, pour favoriser le développement économique du pays.

Pascale Fourier : Mais il y a un truc, là vraiment, que je ne comprends pas... Plus vous parlez, plus j'ai les yeux qui s'agrandissent… mais il me semblait que l'État était là pour préserver l'intérêt des citoyens… Notre intérêt à nous, Français, c'est d'avoir de l'électricité de façon sûre et avec un tarif correct... Quel est l'intérêt de vouloir ouvrir le capital ? Là, ça m’échappe totalement… Pourquoi ont-ils besoin de sous brutalement ?

Francois Soult :Alors ça, c'est une très bonne question, et si j'avais la réponse, je ne me serais pas investi dans toute cette histoire. Et c'est parce que je n'ai pas eu la réponse que j'ai eu besoin d'écrire ça : «  Edf, chronique d'un désastre inéluctable », parce que le la seule réponse que j’ai eue quand je m'occupais du secteur, de la part de tous les interlocuteurs,c’est : « Evidemment, c'est une connerie tout ce qu'on fait, mais c'est inéluctable, parce que il y a une directive européenne, parce qu'il y a un sens de l'Histoire, et le sens de l'Histoire, c'est la privatisation, c’est l'ouverture du capital. ». Alors, l’ouverture à la concurrence, c'est n'importe quoi, ça a été fait, c'est dans le paysage... Je pense qu'il faudrait revenir en arrière, et je pense que si beaucoup de gens ont voté Non au Traité sur l'Union européenne, c'est à cause non pas de l'électricité, mais à cause de choses comme ça qui se sont accumulées.


Et puis, il y a l'ouverture du capital. Il y a plusieurs arguments qui sont tous de mauvais arguments, qui sont des arguments de mauvaise foi. Le premier argument, c'est de dire : « Dans un marché ouvert, on ne peut pas avoir d'acteurs publics, parce que les acteurs publics ne sont pas dans les mêmes conditions que les acteurs privés ». Pour illustrer ce côté horripilant pour certains, d'"acteurs publics dans une sphère privée", je vous rappelle que la Commission européenne a ouvert une enquête contre EDF il y a deux ans de cela, (c'est le commissaire Monti, chargé de la concurrence, qui avait fait ça),... Il avait ouvert une enquête contre EDF en disant : « Ce n'est pas normal ! Il y a une rupture de concurrence: un groupe privé est obligé de se financer sur les marchés, et il se finance à un prix élevé, parce qu’ il y a risque… ; or EDF, dans la mesure où c'est un établissement public, possédé par l'État, bénéficie de la garantie de l'État… et donc la garantie de l'État, se traduit par des taux d'intérêt moindres…". Quand on prête à l'État, on est sûr d'être remboursé un jour, si ce n'est pas demain, ça peut être après-demain, en tout cas on sera remboursé à jour, et on prête pour moins cher….
Donc Monti avait dit (et la Commission qui a obtenu gain de cause in fine) a dit : "EDF se finance à un coût moindre, il faut qu'ils remboursent", donc EDF à payé une amende parce qu'elle trouvait du financement moins cher sur les marchés! C’est une raison totalement aberrante! C'est idéologique, c'est de l'idéologie pure, mais on en est arrivé là!
Donc voilà un des arguments : « On ne peut pas avoir un acteur public dans le champ privé ».


Un autre argument, qui est encore plus de mauvaise foi, consiste à dire : « EDF a besoin d'argent », ce qui est faux.
C'est une contrevérité, mais dans l'article du Monde auquel vous faisiez référence, (celui du 7 septembre), il était dit : « EDF a besoin d'argent pour se développer dans les nouveaux métiers, ou à l'international» . C’est faux! EDF a ce qu'on appelle un "cash-flow", c'est-à-dire de l'argent dans les poches, à ne savoir qu'en faire! Pour des raisons simples, là aussi, c'est qu' EDF perçoit un tarif qui lui permet de rembourser ses coûts de long terme, (dans les coûts de long terme, il y a le démantèlement des centrales, qui interviendra dans 10, 15ou 20 ans, il y a l'amortissement de ces mêmes centrales, il y a des tas de charges dites « calculées », c'est-à-dire que tous les ans, dans ses comptes, EDF dit : " Je gagne 100, mais je constate que, dans 20 ans, je devrai dépenser 50"; donc ça, c'est de l'argent qui est une charge, (et ça vient diminuer le résultat d'EDF sur l'année en cause), mais ce n'est pas une charge qui donne lieu à des sorties d'argent… Ainsi, EDF perçoit 100, mais ne sort finalement que 50… pour payer ses employés, acheter sa matière première, et puis il y a 50 qu'elle garde en réserve dans une cagnotte pour les dépenser dans 20 ans...
Ça, c'est ce qu'on appelle le "cash-flow", c'est ce que Jean-Marie Messier, se targuait d'avoir de plus beau au monde… et bien EDF a, sur la place de Paris, les plus beaux cash-flows… Donc ils ont de l'argent, à ne pas savoir qu'en faire…Ils avaient tellement d'argent que François Roussely, le président précédent d'EDF, le claquait sans même raisonner, ni calculer…sans savoir combien ça lui coûtait… Il a acheté l'Argentine, à la veille de la dévaluation du peso;. Il a mis 2 milliards au Brésil, (ou vous ça doit être un montant approximatif, en euros,) alors même que ça ne valait plus rien… Il a acheté London Electricity pour trois fois le prix… Il avait tellement d'argent qu'il ne savait pas quoi en faire. Aujourd'hui la problématique est la même: EDF a plein d'argent! Et d'ailleurs l'ouverture du capital, qui se traduira par une augmentation de capital, c'est-à-dire on va proposer aux souscripteurs privés, (on proposera peut-être, le jour où ça se fera… moi je mets beaucoup de conditionnel à cela)… on va donc leur proposer d'apporter un peu plus d'argent au capital. Eh bien cet argent-là, aujourd'hui, le management d'EDF ne sait pas quoi en faire. C'est le type même de faux arguments que l'on trouve dans la presse, parce que les journalistes le répètent, mais qui sont des contrevérités.

Pascale Fourier : Il y a un petit truc qui m'étonne, là, jusqu'à présent, visiblement, on cherche à ouvrir le capital à une hauteur de 15 %, mais est-ce que ça veut dire qu'il y a une logique sous-jacente qui ferait que c’est 15 % maintenant, et puis après 20, et puis ensuite 30, etc… et puis finalement, ce serait une véritable privatisation à terme.

Francois Soult : Je ne sais plus qui disait, dans l’actuelle majorité, il y a deux ans: « A un marché ouvert partiellement, une ouverture du capital partielle; à un marché ouvert totalement, une ouverture du capital totale ». Et comme on va ouvrir le marché totalement en 2007, dans cette logique-là, (qui n'est plus celle, officielle, du gouvernement), il faudrait ouvrir à 100 % le capital d'EDF.Aujourd'hui, ce que dit la loi, c'est que EDF doit rester majoritairement publique. Hier, ce que disait le gouvernement, c'était :« On va ouvrir le capital ». L'échéance, c'était le mois d'octobre. Moi j'étais un peu surpris, et un peu triste, parce que ça fait trois ans que je dis : « On ne va pas ouvrir le capital, c'est trop compliqué, il y a des obstacles majeurs, du nucléaire, de l'assurance du nucléaire, il y a des problèmes de frontières au sein d'EDF, et on ne sait pas exactement de quoi EDF est propriétaire, et puis derrière, la hausse des tarifs, politiquement ???... Les gouvernements veulent bien passer EDF dans le privé, (encore que je ne suis pas sûr qu'ils seront capables d'aller jusqu'au bout, politiquement), mais ils ne veulent pas augmenter les tarifs, y compris les gouvernements de droite, qui n’ont pas augmenté les tarifs de l'électricité, comme ils auraient dû le faire pour couvrir les charges d'EDF.
Et donc ce que l'on constate aujourd'hui, c'est qu'on est début octobre, l'ouverture de capital n'est pas là, et comme je le mentionnais tout à l'heure, les Echos, subrepticement annoncent que : « Oh la la! mais c'est plus compliqué, ça" ….2006…on se rapproche de l'échéance politique, et je vois mal le gouvernement prendre la responsabilité d'ouvrir le capital à ce moment-là, donc finalement, l'ouverture de capital ne va peut-être pas se faire. Mais rien ne s'opposerait d'ouvrir d’abord à 15, puis à 45 %, et en final de changer la loi pour dire : « On privatise totalement ».
Aujourd'hui, en tout cas, le dossier est réellement compliqué, parce que la réalité des faits reprend le dessus… les faits, ils sont têtus… on peut changer les lois tant qu'on veut, on constate ensuite, que c'est très complexe d'ouvrir le capital sans augmenter les tarifs. Et moi, je suis presque soulagé, en tous cas en tant que citoyen un petit peu soulagé, et en tant qu’analyste, un petit peu rasséréné si l'ouverture n'est pas pour demain.

Pascale Fourier : Eh bien c’était donc des Sous ... et des hommes,…..et on était en compagnie de François Soult. Alors je vous rappelle que en réalité, vous pouvez écouter sur le site de « des sous » : http://dsedh.free.fr/index1024net.htm deux émissions déjà :
l’une qui a été faite le 9 avril 2002, avec Henri Guaino qui est un ancien Commissaire au plan, de droite, et François Soult, donc, qui était déjà venu le 12 mars 2004 …..
Je crois quand même qu'il faut rester attentif au dossier, même si, effectivement, peut-être que ça ne se fera pas, mais en tous les cas s'il y a pas de pressions du public, ça pourrait bien se faire… Voilà, à la semaine prochaine...

 

 

Rappel : Vous pouvez imprimer ce texte. Quel que soit l'usage que vous en ferez, il vous est demandé de citer votre source : Emission Des Sous...et des Hommes du 2 Novembre 2005 sur AligreFM. Merci d'avance.